Le divorce contentieux est, par définition même, une procédure au cours de laquelle les époux ne parviennent pas à se mettre d’accord. La communication est difficile, tout comme la transmissions en parfaite transparence des documents et pièces justificatives relatives à leurs patrimoines respectifs.
Dans ces conditions, une expertise patrimoniale et financière peut être diligentée par le juge aux affaires familiales. Cette mesure d’instruction est rendue nécessaire afin de clarifier les situations respectives des parties, dans le but de connaître et de s’assurer de l’exhaustivité et de la valorisation actualisée des revenus professionnels, patrimoniaux et entrepreneuriaux, de la surface des patrimoines en présence.
Qu’est ce qu’une expertise patrimoniale et financière ?
L’expertise patrimoniale et financière constitue une mesure d’instruction : en vertu de l’article 255 9° du Code civil qui précise « Désigner tout professionnel qualifié en vue de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux » , le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire, le juge de la cour d’appel peuvent confier une mission d’expertise judiciaire à un professionnel qualifié, à un technicien.
Le principe de contradiction en cas de divorce contentieux
Le travail ainsi conduit par l’expert désigné repose sur le respect du principe de la contradiction : il s’agit d’un principe fondamental de toute procédure civile, pénale et administrative en vertu duquel toute partie peut prendre connaissance des arguments de fait, de droit et de preuve versés aux débats. Selon ce principe de la contradiction, les différents intervenants au procès doivent se montrer loyaux les uns envers les autres quant à la communication des pièces justificatives, des arguments développés, des conclusions. Ces différents éléments produits en justice doivent faire l’objet de débats en présence de toutes les parties.
Ainsi, le travail conduit par l’expert judiciaire quant à l’analyse patrimoniale, financière et économique respective des parties, passe par l’analyse contradictoire des pièces justificatives, par les entretiens et réunions de travail contradictoires réunissant avocats et parties. Les notes d’expertises, projets de rapport et rapport définitif rédigés par l’expert judiciaire sont également transmis de manière contradictoire à l’ensemble des parties.
La conduites d’investigations par l’expert judiciaire
L’expertise patrimoniale et financière s’articule autour de l’analyse des pièces justificatives versées contradictoirement aux débats.
Ces pièces sont établies par des tiers pouvant être :
- Les notaires : actes authentiques d’acquisition des biens immobiliers, relevé de la comptabilité des notaires, actes de donation, actes de donation-partage, actes de dévolution successorale, notamment.
- Les établissements bancaires : relevés de comptes courant et d’épargne, actes de prêt, tableaux d’amortissement des prêts.
- Les compagnies d’assurances : relevés semestriels ou annuels de situation pour les contrats d’assurance-vie.
- L’administration : avis d’imposition sur le revenu des personnes physiques, avis d’imposition sur la fortune immobilière, avis de redressement fiscal, correspondances échangées entre les époux et l’administration.
- Les experts-comptables et les commissaires aux comptes :établissement des états financiers annuels, rapports des commissaires aux comptes.
- Les entreprises interposées : rapports annuels de gestion, procès-verbaux des assemblées générales ordinaires et extraordinaires.
Comprendre la situation économique des époux lors d’un divorce
Une fois collationnés, ces documents appelés « pièces justificatives » permettent ainsi à l’expert judiciaire de comprendre la situation économique des époux dans le cas d’un divorce contentieux, ceci sur le plan de leurs revenus respectifs et des patrimoines en présence.
- Patrimoine commun pour des époux mariés sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts
- Patrimoine indivis pour des époux unis sous un régime séparatiste
- Patrimoine propre ou personnel des parties.
Si le recensement des biens communs ou indivis est effectué en date des effets patrimoniaux du divorce entre les parties (date de séparation, date du prononcé de l’ordonnance de non-conciliation dans les procédures antérieures au 1er janvier 2021), la valorisation des différentes composantes patrimoniales (biens immobiliers, droits sociaux notamment) est effectuée à la date qui soit le plus proche possible du partage.
Expertise patrimoniale : Le rapport de l’expert
Le résultat de l’expertise patrimoniale et financière est matérialisé par le rapport déposé par l’expert judiciaire. Ce rapport a fait l’objet de notes intermédiaires circonstanciées, d’un projet de rapport intégrant les dires des avocats et y répondant. En fonction du rapport de l’expert judiciaire destiné à éclairer le juge aux affaires familiales, le juge de la cour d’appel, le magistrat peut ainsi rendre sa décision.
Le résultat de l’expertise judiciaire peut également passer par un rapprochement financier entre les époux, par la construction d’accords grâce au concours des avocats quant aux valeurs financières à retenir, quant à la formation des lots à partager, quant au quantum de la prestation compensatoire et à ses modalités de règlement à l’époux(se) qui s’en trouve créditeur.
Même si l’expert judiciaire ne doit pas concilier les parties, ses travaux peuvent concourir également, non seulement à la manifestation de la preuve mais encore à la formalisation d’accords raisonnés, bien compris et acceptés par les époux.